Pour fuir les froidures hexagonales, quoi de plus indiqué qu’un trip à Marrakech ? Bruyante, fêtarde, vitaminée, la Ville ocre est à la fois un shoot de dépaysement et un antidote au stress à trois heures de Paris.
Avez-vous déjà embarqué à bord du Marrakech Express ? Non ? Bon, sortons les diapos, alors. Une place mondialement connue, gigantesque, assommée de soleil, surchargée de sons, qui, la nuit tombée, se transforme en resto à ciel ouvert et en théâtre en plein air. Des souks, labyrinthiques, cela va de soi, dans lesquels vous trouverez tout, de l’« Adidas berbère » (la babouche en cuir de chameau) à des surnoms
sympas (« Mohamed Tajine », « Antonio Banderas »…). Des hammams bien sûr, où se faire ramollir le cuir avant de se le faire tanner. Un palais au charme suranné (Bahia). Des jardins extraordinaires (mention spéciale au fantastique Majorelle, dans lequel reposent les cendres d’Yves Saint-Laurent).
Sans oublier la cuisine marocaine, omniprésente et tellement succulente qu’elle peut tourner pour un esprit faible à la véritable obsession. Une règle d’or à ce propos, et qui marche presque à tous les coups :
moins c’est cher, moins ça paye de mine, et plus c’est bon. Le vrai tajine, celui qui vous fera défaillir, se déguste au côté d’ouvriers. Quelques adresses ? Les grillades les plus folles : Chez Brick. Le meilleur poulet : à l’Escale. Et le stand 14 de la place pour le poisson.
Moins connu : Marrakech est aussi, avec Beyrouth, la ville arabe la plus propice à la teuf. Resto-bars branchés (le Comptoir, le Bo-Zin), bars et boîtes d’hôtel (le Bab, le So), clubs démesurés (le Silver et, surtout, le Pacha, le plus grand d’Afrique), cabarets marocains avec musique traditionnelle, en guise d’after (le Jasmin)… « Kech » a tout ce qu’il faut pour vous emmener au bout de la night. Les Marocains eux-mêmes ne s’y trompent pas, et le soir, la jeunesse dorée de Rabat et de Casa se défie à coups de commandes ostentatoires de magnums de champagne.
Terrain quotidien de cet affrontement, le club le plus marquant, le Theatro, n’est pas sans rappeler le Palace parisien par son architecture, celle d’un amphithéâtre, mais aussi par son ambiance très allumée et sa clientèle éclectique. Fils et filles de bonne famille marocaine, MRE (Marocains Résidant à l’Etranger, l’acronyme désignant les Français d’origine marocaine revenus au bled pour les vacances), homos, touristes, expats, prostituées, jeunes, moins jeunes s’y côtoient dans le plus joyeux bordel. L’ambiance est certes bling-bling et parfois kitsch (pluie de paillettes, cracheurs de feu maquillés façon drag queens), le son pas forcément pointu (on est plutôt sur les terres de Guetta que de Ed Banger), mais il règne ici une énergie que l’on ne trouve plus sous nos latitudes. Chose incroyable : on s’y amuse vraiment.
Claude Challe, a Buddhaman in Maroc
Un peu plus de dix ans que le Challe s’est posé à Marrakech. Celui qui annonçait en 2000 dans nos colonnes que « l’Occident ne s’en sortirait pas» poursuit béatement son exode oriental. Après avoir été une figure de la nuit parisienne dans les années 80 (il crée les Bains-Douches, reprend le Palace), un DJ mondialement connu dans les années 90 (les compiles « Buddha Bar », c’était lui), il a, dans les années 2000, parfait l’aura jet-set de Marrakech en y faisant rappliquer tous ses copains people. C’est dans le lieu qu’il vient d’ouvrir, le Djellabar, un superbe resto lounge, que Claude nous accueille chaleureusement : même casquette bizarre, même bagout new age et des anecdotes à la pelle. Il sera notamment question de « tossing » (il en était adepte dans les 70’s), du « climax », l’ancêtre du MDMA (il ne crachait pas dessus dans les early 80’s), de Bizot et de mutants. Ah, la charmante copine de Claude – une Marocaine, facile deux fois plus jeune que lui – débarque. Il est temps de passer à table !
LA CHECK-LIST
Le film
Une bonne moitié du classique hitchcockien se déroule à Marrakech. Une jolie manière de commencer à fantasmer sur la « Ville ocre ». Que sera, sera…
Le livre
La Terrasse des paresseux, journal intime de Véronique Bruez, une diplomate française en poste à Marrakech, est une plongée dans l’envers de la ville : excès, jeunesse dorée mais aussi tout un tas d’observations lumineuses sur la culture marocaine. (Léo Scheer).
Un permis de conduire
Marrakech, c’est aussi l’occasion de louer une voiture pour s’offrir un road trip vers le sud du pays et ses paysages extraterrestres.
Des Tupperware
Le meilleur cadeau à rapporter à vos amis ? Des gâteaux marocains of course. Meilleure adresse de la ville : Chez Madame Alami, dans le quartier de Guéliz.
OÙ LOGER ?
Sûrement l’un des hôtels les plus connus au monde. Ne faisons pas la fine bouche : sa réputation n’est pas usurpée. Totalement reconstruit entre 2006 et 2009 sous les ordres de l’architecte-décorateur Jacques Garcia, la Mamounia se dresse plus féerique que jamais au milieu de ses sept hectares de jardins aux senteurs d’orangers et de jasmin. Venir ici, c’est marcher dans les pas de la ribambelle de personnalités qui ont séjourné entre ses murs : Chaplin, Mastroianni, Delon, Churchill, le plus grand amoureux de l’hôtel où il prenait ses quartiers d’hiver. Accueil irréprochable, cuisine à tomber par terre, chambres jouant du merveilleux oriental sans surcharges inutiles, piscine et spa sublimes… Si l’oncle Winston était encore vivant, nul doute qu’il aurait conservé l’adresse. Chambre double à partir de 500 €.
Le plus intimiste : la Villa des Orangers
A deux pas de la place Jamaâ El Fna, cet hôtel Relais & Châteaux aménagé dans un ancien riad est une oasis de calme nichée au cœur de Marrakech la bruyante. Un personnel aux petits oignons caramélisés, un patron français on ne peut plus accueillant, une cuisine raffinée, des patios verdoyants prompts à inspirer du très gros chillage, sans oublier un hammam impec, des piscines en rez-de-chaussée et en terrasse.
SÉBASTIEN BARDOS