SAINT-JEAN-DE-LUZ : RÉVÉLATIONS, COUPS DE CŒUR ET PALMARÈS

Saint-Jean-de-Luz festival 2024

Pendant une semaine, le magnifique festival de Saint-Jean-de-Luz a donné à voir le futur du 7e art, avec de nouveaux visages et de nouveaux talents, du cinéma beau et métissé aux origines japonaises, indiennes ou géorgiennes.

C’est un des festivals les plus excitants de France, un festival comme une caresse, ouvert au public, qui célèbre les jeunes talents et les grands noms de demain en présentant des premiers et seconds films. Effectuée par Patrick Fabre, la sélection de cette 11e édition était d’un très haut niveau, à la fois pointue et grand public, et les spectateurs ne s’y sont pas trompés puisque les projections étaient quasiment toutes complètes dans le beau complexe de la ville, Le Select. Au côté de la présidente du jury Zabou Breitman (qui présentait un très beau film, Le Garçon, qu’elle a réalisé), on a pu cette année encore visionner des films passionnants, poétiques et/ou politiques. Parmi toutes les œuvres présentées, trois films qui parlent de territoire, de liens familiaux et de métissage, reflètent parfaitement l’exigence du festival de Saint-Jean-de-Luz qui donne à voir de nouveaux visages et révèle les grands noms de demain.

Inspiré du beau roman d’Elisa Shua Dusapin, Hiver à Sokcho est une pure merveille. Soo-Ha, 23 ans, travaille dans une petite pension de Sokcho, petite ville balnéaire de Corée. L’arrivée d’un dessinateur français, incarné par Roschdy Zem, réveille en elle des questions sur son identité et sur son père français dont elle ne sait presque rien. Il est question d’impermanence, de cicatrices toujours béantes, de portes qui se ferment et l’on pense à Ozu, Kore-eda ou au dessinateur Jirō Taniguchi. C’est beau comme un haïku, un bateau sous la neige, un regard embrumé. C’est le premier long du réalisateur franco-japonais Koya Kamura, dans lequel rayonne la sublime Bella Kim, révélation de la semaine. Sortie en janvier prochain.

La déflagration du festival, c’est Little Jaffna de Lawrence Valin, un polar situé dans la communauté tamoule de Paris, un mix entre Scorsese et le cinéma de S.S. Rajamouli. D’origine indienne, Valin a écrit, réalisé et interprété ce polar hors norme parce que personne en France ne lui offrait autre chose que des rôles de vendeur de roses ou d’épicier. Résultat, il signe une histoire de flic infiltré au sein d’un gang de truands tamouls, opère la greffe du cinéma indien et du cinéma d’auteur français, pousse tous les curseurs dans le rouge et fait souffler un vent frais sur notre production en révélant de nouveaux visages, des acteurs non professionnels indiens absolument déments, un peu comme l’avait fait Jacques Audiard à l’époque d’Un prophète. Sortie de Little Jaffna en février prochain.

Autre grosse claque de la sélection, Brûle le sang est une histoire de crime et de châtiments au sein de la communauté géorgienne de Nice. Le premier film d’Akaki Popkhadze, 34 ans, évoque le cinéma de Scorsese et le Little Odessa de James Gray et malgré quelques trous dans le scénario, il y a une promesse, une croyance absolue dans le cinéma et des acteurs – Nicolas Duvauchelle, Florent Hill et Finnegan Oldfield – absolument incandescents.

Sortie prévue en janvier. 

PALMARES

Prix du public:
LES ENFANTS ROUGES de Lotfi Achour

Prix de la Critique :
HIVER À SOKCHO de Koya Kamura

Prix du Jury Jeunes:
LITTLE JAFFNA de Lawrence Valin

Prix d’interprétation masculine :
LAWRENCE VALIN dans LITTLE JAFFNA

Prix d’interprétation féminine :
HAMIDEH JAFARI dans AU PAYS DE NOS FRÈRES

Prix de la mise en scène :
LOTFI ACHOUR pour LES ENFANTS ROUGES

Grand Prix :
AU PAYS DE NOS FRÈRES de Raha Amirfazli et Alireza Ghasemi


Par Marc Godin
Photo : Déborah Puente