Anthony Colombani, Directeur Global de la Communication, et Tanguy Moillard, Directeur de la Communication & Marque de Bouygues Telecom, décryptent les évolutions du marché télécom : des besoins numériques aux nouveaux codes de la création publicitaire. Entretien sans fil(tre).
Avec près de 70 millions de cartes SIM actives en France, est-il possible d’espérer une nouvelle croissance sur le marché de la téléphonie ?
Anthony Colombani : La croissance nette du marché mobile s’est ralentie, en effet. Mais les opérateurs, eux, doivent continuer à grandir pour investir, innover et mieux servir leurs clients. Pour cela, chez Bouygues (n°1 du Wi-Fi en France – au score global nPerf issu du dernier baromètre WiFi 2023 des connexions Internet résidentielles en France métropolitaine depuis l’application nPerf avec des terminaux Android et IOS. Détails sur nPerf.com, ndlr) nous avons décidé de nous réinventer avec un nouveau plan stratégique, qui comprend le lancement de nouvelles offres, notamment dans le Fixe.
Vous faites allusion à votre offre B.iG destinée aux familles. Comment répond-elle à leurs besoins numériques et préoccupations actuelles ?
A.C : Absolument. B.iG est une proposition unique sur le marché. Elle associe une box et des forfaits mobiles à prix dégressif. Plus vous prenez de lignes et plus les prix unitaires diminuent. Mais, outre cette mécanique qui n’existe pas chez nos concurrents, nous réinventons également la notion de foyer puisqu’il n’est pas nécessaire d’habiter sous le même toit pour en bénéficier. En fait, B.iG est une réponse à deux besoins fondamentaux : faire des économies et gérer facilement toutes lignes de la famille, des grands-parents aux petits enfants.
Qu’en est-il des technophiles ?
A.C : Pour eux, nous avons une autre proposition. Là ou B.iG amène un package de services pour toute la famille (internet, décodeur TV, téléphone…), B&YOU Pure fibre, comme son nom l’indique, est une offre nue. Sa promesse est très simple : c’est le meilleur de la connectivité à la maison… et rien d’autre ! Le super flux sans superflu, comme dit la pub. C’est également très nouveau, et sans équivalent chez nos concurrents.
À qui s’adresse cette offre ?
A.C : Aux personnes qui sont très exigeantes sur la qualité de la connexion (gamers, télétravailleurs, amateurs de vidéo online…) mais qui n’utilisent pas le décodeur TV de leur box ou leur téléphone fixe. Et ils sont de plus en plus nombreux.
C’est « Internet nu ». D’où votre slogan : « Le super flux sans superflu ». La création publicitaire doit-elle aussi se réinventer dans un contexte de surabondance de contenus ?
Tanguy Moillard : Il y a quinze ans, le public était exposé à environ 2000 logos par jour. Aujourd’hui, ce chiffre oscille entre 15 000 et 20 000. L’ambition d’un objet publicitaire est désormais double : d’un côté, divertir, procurer de l’émotion, et de l’autre éviter au consommateur d’avoir le sentiment d’avoir perdu son temps. Il est donc important de lui proposer une information à la fois utile et originale.
Cela implique-t-il de repenser vos plans médias et vos pubs ?
T.M : Absolument. Nous sommes vigilants à ne pas surdiffuser notre contenu.
A.C : Le gros enjeu de la campagne B.iG, c’était de bien faire comprendre l’originalité de l’offre simplement et de manière originale et décalée, comme dit Tanguy. D’où le personnage de Ramzy, qui joue un père de famille débordé qui croule sous les factures de téléphonie… et découvre B.iG pour lui simplifier la vie. Au-delà de l’esthétique de la pub, c’est cette histoire que nous voulions raconter.
Entamons-nous une nouvelle ère de la publicité ?
T.M : Je le pense. Désormais, nous nous adaptons aux codes des plateformes telles que Snapchat, TikTok ou Instagram, pour nous intégrer directement à leurs univers. La publicité, de fait, se réinvente en partant davantage des émetteurs, plutôt qu’en dupliquant des formats conçus initialement pour d’autres canaux comme la télévision. Pour cela, il faut parfois adapter notre charte graphique, sans pour autant aller à l’encontre de notre positionnement et de nos valeurs.
Cela peut-il être vu comme une difficulté pour les marques ?
T.M : La construction d’une marque exige une cohérence via ses différents leviers de communication (son logo, son identité visuelle, etc.), mais de nos jours, ce qui prime, c’est avant tout la cohérence du message.
Vos publicités arborent également le label « Ecoprod ». En quoi la dimension écologique est-elle une nouvelle règle du jeu ?
T.M : La publicité s’engage également en adoptant une dimension responsable. Bien qu’elle soit animée par une logique commerciale, elle est désormais soumise à la sobriété énergétique qui exige une certaine sobriété esthétique. Cette tendance conduit à l’émergence d’idées plus fortes et plus pures.
Comment se traduit la sobriété énergétique dans le domaine des forfaits téléphoniques ?
A.C : L’essentiel de l’empreinte carbone d’un opérateur – environ 90 % – provient des terminaux eux-mêmes. C’est pourquoi nous proposons, depuis plusieurs années, des Smartphones reconditionnés à nos clients, via des acteurs tels que Recommerce ou encore, depuis peu, Back Market. Mais nous agissons aussi pour réduire notre consommation énergétique et, en particulier, celle de nos antennes mobiles. C’est un vrai défi, car il faut y parvenir en maintenant une qualité optimale. Nos équipes y parviennent, par exemple, en mettant en sommeil, la nuit, les bandes de fréquences qui ne sont pas utilisées.
« L’IA EST POUR NOUS UN ACCÉLÉRATEUR D’IDÉES PLUTÔT QU’UN OUTIL DE CRÉATION. »
Comment utilise-t-on l’IA chez Bouygues Telecom ?
T.M : Dans le domaine de la communication, à ce stade, L’IA est pour nous un accélérateur d’idées plutôt qu’un outil de création. Elle nous permet de réaliser facilement des visuels, ce qui nous fait gagner du temps, réduit nos coûts et notre empreinte carbone.
A.C : Nous utilisons également l’IA pour la maintenance de notre réseau ou la relation client, avec des chatbots de plus en plus performants, qui permettent à nos clients de nous joindre 24 heures sur 24. Nous avons également lancé un assistant de vente qui les aide à choisir leur Smartphone. En interne, les 10 000 collaborateurs de Bouygues Telecom bénéficient de LucIA et ils sont des milliers à l’utiliser chaque jour pour leurs tâches quotidiennes.
Enfin, comment envisagez-vous l’avenir de la téléphonie et d’internet ?
A.C : Ce sont des besoins essentiels. À nous de trouver comment permettre à tout le monde d’en bénéficier simplement et pour un prix accessible. Démocratiser l’accès à la téléphonie, c’est une constante chez nous depuis notre création en 1996.
T.M : La publicité évolue avec les tendances de consommation. Elle sera donc de plus en plus sur-mesure et adaptée à nos cibles. Nous veillons également à ce que nos créations reflètent un mode de vie plus actuel et nous faisons en sorte que nos castings soient plus inclusifs et plus responsables. Notre objectif est de rester fidèles à notre positionnement de marque et de renforcer notre vision : la technologie pour rapprocher les individus.
Par Alexis Lacourte
Photo Axel Vanhessche