FESTIVAL MÊME PAS PEUR 2025 : SEXE, FANTÔMES ET STÉROÏDES

Festival Même pas peur 2025

Festival du film fantastique de l’île de la Réunion, Même pas peur aligne les bons films, étranges et transgressifs. La preuve par deux.

Dans le Sud sauvage de l’île de la Réunion, un festival sauvage présente des films… sauvages. Cette année, Aurélia Mengin a donc  une nouvelle fois concocté une sélection étrange, décalée et transgressive pour le quinzième anniversaire de son festival, Même pas peur. Au programme, des fantômes énervés, un surfer qui n’arrive pas à surfer, des golden showers, des tentacules, des serial killers, des corps ouverts, déformés, stéroïdés… 

LE CHOC BODY EXPERIENCE.

Pour son premier long-métrage, Body Odyssey, la réalisatrice italienne Grazia Tricarico colle au string de Mona, culturiste de 45 ans, à la recherche frénétique de la perfection et d’une beauté du troisième type. Entre séances de muscu et injections de produits divers et variés, elle se métamorphose en une créature improbable, sous le joug d’un entraîneur-dictateur (excellent Julian Sands dans un de ses derniers rôles), s’éprend d’un jeune éphèbe blond tandis que son propre corps semble bientôt lui parler d’une voix caverneuse… Et c’est parti pour 95 minutes de visions singulières, d’étrange étrangeté, de plongée dans les abysses. Avec un talent ahurissant, Grazia Tricarico filme un corps mutant sous toutes les coutures, comme un territoire nouveau, mythologique. Avec une photo rutilante, d’incroyables plans séquences, son « odyssée du corps » (un clin d’œil à Kubrick et son odyssée de l’espace ?) explore la frontière entre sensualité et body horror, avant de se métamorphoser en espace mental quand la cinéaste plonge dans les tréfonds de l’esprit torturé de son héroïne. Sous influence à la fois esthétique et thématique de David Cronenberg (avec son mantra « body is reality »), le film ne fait qu’accélérer, multiplie les visions chocs, inoubliables, et laisse le pauvre spectateur pantelant, abasourdi, pas vraiment sûr de ce qu’il a vu, mais persuadé qu’il a assisté à un grand moment de cinéma.

LE RETOUR DE CHOI MIN-SIK

Même si le cinéma coréen a perdu de sa splendeur, il balance tous les ans deux ou trois petits bijoux . Après Sleep, présenté l’année dernière à Même pas peur, voici Exhuma, primé à Gérardmer, grosse machine qui a fracassé le box office de son pays d’origine, une histoire de spectres vengeurs et de gentils chamans. Les deux jeunes chamans sont appelés par une riche famille coréenne expatriée aux USA, persuadée qu’une sombre malédiction plane sur leur bébé malade. Ils sollicitent alors un duo formé d’un géomancien et d’un croque-mort, qui les conduisent vers une mystérieuse tombe au cœur d’une forêt… Et c’est parti pour 2H 20 de rituels magiques, d’esprits démoniaques venus du Japon, de possessions, de sorts mortels et d’excavations de tombes… Troisième long-métrage de Jang Jae-hyun, Exhuma remplit son contrat sans génie mais avec efficacité. C’est généreux, souvent flippant, rondement mené malgré quelques baisses de rythme, mais le principal défaut du film, c’est qu’il arrive après The Strangers, de Na Hong-jin, chef-d’œuvre authentiquement terrifiant de diable et chamans, avec en bonus une inoubliable scène d’exorcisme. Néanmoins, les petits génies des effets spéciaux assurent et Choi Min-sik, héros de Old Boy et de J’ai rencontré le diable, fait le show en ghostbuster héroïque. Bref, ça se visite, d’autant que le film devrait sortir prochainement en salles… 

Festival Même pas peur
https://festivalmemepaspeur.com/


Par Marc Godin