GRAIG MONETTI : « L’ÉDITION DE LA RÉVOLUTION »

Graig Monetti nice jazz fest

Avec l’ambition de faire de Nice un pôle culturel français, l’adjoint au maire Graig Monetti prépare sa révolution du plus vieux festival de jazz au monde. Jazz, the new cool ?

C’est ta première édition à la tête du Nice Jazz Fest’. Objectif ?
Graig Monetti : De retrouver la genèse de sa création en 1948, révolutionnaire et punk, lorsque Louis Armstrong jouait à l’Opéra de Nice devant un public de blancs. Le jazz est une musique engagée et humaniste qui vient porter un message issu des minorités. L’idée est donc d’offrir une programmation qui parle aux aficionados du jazz tout en étant transgressive, radicale, et proposer avec, cette année, des choix clivants.

Lesquels ?
On a fait une édition à forte influence afro et caribéenne et on a pris des risques avec des artistes qu’on imagine grandir comme Yannis & The Yaw qui viennent tout juste de sortir leur premier album, Rejjie Snow, un rappeur que j’adore, qui sort un album en juin, ou Dabeull, Julien Granel… Ainsi que Nas, qui fera sa première date européenne chez nous pour son retour et les 30 ans de l’album Illmatic.

Comment faire de Nice une place culturelle forte à la hauteur de Marseille ?
C’est mon ambition. Je l’ai amorcée avec le sport, en organisant un Ironman, la coupe du monde de rugby, les épreuves des Jeux, et l’arrivée du Tour de France pour la première fois dans l’histoire de la ville. Je le fais désormais avec la musique qui est ma passion. D’abord le Stockfish, une salle ouverte en sortie de confinement, à la programmation ambitieuse (Synapson, The Blaze et Martin Solveig y sont passés, ndlr) qui accueille désormais 40 000 spectateurs par an, avec une jauge à 600. Quant au Nice Jazz Fest’, on se donne un an pour faire l’édition du retour, de l’audace, de la provoque… Et l’année prochaine sera l’édition de la révolution.

Comment ?
Si tout se passe bien cette année, on augmentera la jauge, pour la passer de 11 466 à près de 40 000, et on proposera un modèle économique différent, ainsi qu’une programmation encore plus surprenante. On sera alors de retour aux yeux de tout le monde.

Le festival se déroule autour de deux scènes (Masséna et le Théâtre de Verdure), toutes deux installées au niveau du centre historique de la ville. Avec une proposition simple : pour chaque journée, la fusion des styles et des genres. « Jamais dans la tendance mais toujours dans la bonne direction » ?
Les deux sont possibles : on est peut-être un peu en avance, mais on est dans la bonne direction. Toute l’offre musicale est en train de se redessiner, pensée à la manière du « Sympathy For The Devil » des Rolling Stones, c’est-à-dire de la vraie instru, à la base de la base. J’ai voulu faire une édition exigeante. C’est autre chose de faire du DJ set, ce que je fais sur d’autres événements, et d’accueillir des bands de dix musiciens dont on ne sait pas à quelle heure se termineront leurs lives. Je crois que les gens ont envie de ça. Coachella est devenu un studio d’enregistrement de cinéma plutôt qu’un espace de concert – qu’on parle du live de Tyler, The Creator ou de Doja Cat.

Les lives que tu ne manqueras pas ?
Au théâtre de verdure, je veux voir Theo Croker et Léon Phal. À Masséna, Nas et Jungle.

Un mois avant d’annoncer la programmation de l’édition 2024, tu as annoncé les noms de ceux qui n’y seraient pas (Ibrahim Maalouf en tête). Pourquoi ?
C’était une marque d’affection ! L’idée était de dire, c’est l’artiste qu’on vous a le plus proposé depuis les dix dernières années, mais ouvrons-nous à autre chose.

Ton premier souvenir du Nice Jazz Fest’ ?
Isaac Hayes au milieu d’une armée de musiciens qui débarque avec sa canne et met tout le monde d’accord avec « Shaft ». C’est un rêve de gamin d’être au leadership de ce festival.

 

Par Alexis Lacourte
Photo Davide Carson