À jamais murmuré, caché, déguisé… le plaisir, quelle que soit sa nature, a toujours été un sujet au coin de nos lèvres. À travers ses peintures, Oh de Laval, comme un mantra, nous rappelle qu’il est temps de « Take your pleasure seriously ».
« Le but est de se détendre, de boire un verre et d’oublier la vie quotidienne le temps d’une visite dans la galerie. » Le plaisir avant tout, surtout devant ses œuvres d’art. Oh de Laval s’expose sans détour à la galerie Marguo. Lorsque l’on se retrouve face à ses œuvres, l’artiste thaïlando-polonaise nous suggère que nous avons chacun une signification différente du plaisir, qu’il peut être dangereux, mais surtout qu’il n’est pas pris au sérieux. Les relations et les pulsions humaines intéressent Oh de Laval, qui a d’abord obtenu un diplôme de sociologie avant d’utiliser des pinceaux. Devant l’impression que nous avons que beaucoup de ces personnages atteignent l’orgasme, elle nous répond que « ce que vous voyez est un reflet de vous, pas de moi. » Alors sommes-nous obsédés par le plaisir tant nous vivons dans une période de frustration ? Sa réponse est qu’en « cette période de peur, le plaisir peut ne pas être une plaisanterie ».
VIOLENCE BABY
Une morsure cannibale, une femme se cousant la peau, un requin la gueule ouverte… Le plaisir des personnages de Oh de Laval est en proie à un danger. On pourrait croire, quand on les voit peints à la manière de livres pour enfants et se situant dans des espaces oniriques, qu’ils vivent dans un monde rose bonbon où le plaisir n’est que légèreté. Mais existe-t-il un monde où il n’est pas menacé par un danger ou une violence quelconque ? Essayant d’être la plus réaliste possible, l’artiste nous répond que ce n’est pas sûr, car « comme c’est le cas dans la vie réelle, on a l’impression que le danger est au coin de la rue ». La façon dont elle peint cette violence si proche et ses fantames, que la galerie Marguo qualifie de « gourmands », crée un dialogue entre le plaisir sensuel et le danger mortel.
INTERDIT AUX -18 ANS
Ce trait amusant ou mignon pourrait nous faire croire que l’on entre au pays des délices, tel Alice au pays des merveilles, mais le titre évocateur de ses anciennes œuvres s’accorde à nous dire que nous faisons fausse route et que ce sont des délices pour les plus de 18 ans. Ainsi que certains sujets, que cette gourmandise par aplats de couleurs adoucit, comme Dimanche soir à Paris où la bonne est prise en levrette sur la commode par celui qu’on imagine être le maître de maison. Vu de loin, on penserait que l’appartement parisien est celui de certains dessins animés, alors on vous conseille de vous approcher un peu plus près. L’œuvre phare de l’exposition, portant son nom, est un close-up de deux jambes ouvertes habillées de portes jarretelles que deux hommes embrassent. Entre ces jambes, en arrière plan, une petite fille à couettes, ébahie, en fait tomber sa sucette. Ce sera peut être la réaction de certains spectateurs devant les peintures provocatrices et ironiques de l’artiste de 33 ans. Les toiles de Oh de Laval présentent un plaisir sexuel assumé qui devrait être comme ce qu’elle décrit pour son art, c’est-à-dire « qu’il progresse toujours et n’ait jamais de forme définitive. »
(Jusqu’au 6 mai, à la galerie Marguo, 4 rue des Minimes, 75003)
TAKE YOUR PLEASURE SERIOUSLY
OH DE LAVAL
Galerie Marguo, Paris.
Par Mathilde Delli