PASCAL MONFORT : « LE GRAAL DE LA HYPE »

Pascal monfort technikart

Pascal Monfort a créé l’équivalent de la caverne d’Ali Baba pour les aficionados de la mode sur papier, la boutique-librairie Ephemera (Paris 9e). Il nous fait visiter.

Demi-dieu dans l’Olympe de la hype parisienne au début des années 2000, Pascal Monfort a suivi le parcours des branchés de l’époque: intégrer un magazine (Clark, en Angleterre), avoir participé à la soirée Prada au siège du Parti communiste, avoir foulé le sol du Baron et du ParisParis, être cité dans Technikart, connaître les journalistes de Jalouse, lancer son groupe de musique (The Shoppings, « Tu fais quoi dans la vie ») et passer sur Nova, avoir un métier dans le secteur de la mode – en devenant professeur de sociologie de la mode, puis en décrochant chez Nike le poste de « responsable des tendances » (« j’étais le roi de la fête »), et enfin, en créant son propre cabinet de conseil, REC trends marketing.

Aujourd’hui, Pascal Monfort s’est assagi – il porte des lunettes sur-mesure Maison Bonnet et ne boit plus – mais n’a rien perdu de son obsession pour la mode. Il vient d’ouvrir Ephemera (29 rue de Trévise 75009 Paris), une librairie où l’on peut consulter et s’offrir toute sorte de documentations de mode ; livres, magazines, lookbooks… Interview hypée.

Vous avez été prof en sociologie de la mode, votre cabinet de conseil en tendance REC a fêté ses dix ans, et vous venez d’ouvrir Ephemera, une boutique de documentations fashion. Avec quel magazine avez-vous découvert la mode ?
Pascal Monfort : Dans mon village, Briey, il y avait une maison de la presse. J’y ai commencé par acheter des magazines de bicross, puis de skate et enfin, Vogue Homme, avec leurs vignettes sur les défilés… Puis avec les magazines anglais, The Face, ID…

À la fin des années 1990, vous débarquez en Angleterre.
Oui, j’ai bossé au supplément de The Guardian, comme styliste, puis j’ai été rédac chef mode de Clark, tout en faisant la plonge pour gagner ma croûte. Puis, on m’a proposé un poste de prof en socio de la mode à Paris…

Londres, c’était l’Eldorado des mag’ branchés à l’époque ?
Les magazines anglais correspondaient à l’idée que je me faisais de la mode, à savoir que la mode, la musique, le sport et l’art fonctionnaient de concert. Par exemple, The Face sortait et bam !… première couverture de Björk, ou découverte du mannequin qui va tout faire péter avec Kate Moss, puis Air, les Daft Punk… Les Anglais ont tout validé…

C’est à Paris, vous avez véritablement intégré la « hype » ?
En 1997, j’ai fait mon premier stage à Paris dans la mode. Entre midi et deux, on m’a envoyé découvrir un magasin qui venait d’ouvrir et s’appelait Colette… j’ai pris la gifle de ma vie. C’est devenu une obsession. Alors j’ai tout fait pour me construire un réseau.

Via les magazines, là aussi ?
Le Graal de la hype, c’était d’être dans un magazine. Il n’y avait pas les réseaux sociaux à l’époque, donc la colonne » nuit blanche » de Libé, les pages nuits de Technikart – je me souviens du numéro « la hype est-elle un métier d’avenir » (2002) dans lequel j’ai été cité ! – Jalouse, etc. Et puis les soirées, où on se connectait. On sortait beaucoup.

Le conseil pour réussir sa soirée branchée ? 
Avoir quelque chose à vendre pendant la journée. Ce qui m’a sauvé, c’est que je me levais le matin et je surbossais tout le temps. Les kings de l’époque étaient des hard workers. Et ils sont allés plus vite que les autres. Sarah Andelman, André, Justice… Comme Pedro Winter aujourd’hui, ou Kiddy Smile, par exemple : au dîner de Babeth Djian, il est au platine, à l’Élysée, il est là… Il répond au tél, quoi. 

La hype, c’est quoi maintenant ?
Instagram ?

Oui. Par exemple, ce qu’a fait Alexandre Maras avec Gala.
Ouais, il est tellement malin. Il vient aux soirées, et ça suffit presque, quoi.

La place de la mode dans la presse magazine aujourd’hui ?
Elle est capitale, qu’on le veuille ou non, parce qu’elle est génératrice d’annonceurs. Elle va permettre au magazine de créer un écosystème. Les articles de mode liés à la littérature ou au cinéma sont toujours un booster.

Le titre à conseiller à un ami ?
M, le Monde, pour la qualité des talents et l’absence de superflu.


Entretien Violaine Epitalon