L’audace, la liberté et la disruption : voilà ce qui caractérise ces game-changers. Ils ont été réunis par Technikart et Swatch pour nous partager leur manière de s’emparer de notre bien le plus précieux : le temps. Organisation entre maîtrise et lâcher prise… Time’s up !
Par Léontine Behaeghel
Photos Anaël Boulay
DA Alexandre Lasnier
MUHA Gabrielle Hoarau-Kozo & Antoine L’Hebrellec
Film Greg Kozo
IMHOTEP, AGENT À VISION : « GAGNER DU TEMPS »
Pendant le confinement, Imhotep, 19 ans, a réuni des TikTokeurs français dans une villa. Une docu-série sur eux vient d’être lancée : Au cœur de la French House…
Tu as créé la French House sur TikTok durant le confinement. Tu avais déjà l’idée avant ?
Imhotep : À l’origine, j’avais un petit compte Instagram avec 800 abonnés. Mais j’ai toujours été créatif et j’étais actif dans le monde de la mode : j’avais notamment un partenariat avec le King’s College à Londres sur un spectacle de danse. Ça a été annulé à cause du Covid : j’ai dû trouver autre chose !
D’où la French House, association de plusieurs jeunes créateurs de contenu.
Je me suis mis à consommer pas mal de réseaux sociaux durant le confinement. J’ai téléchargé TikTok et j’ai adoré. En voyant les créateurs américains, je me suis intéressé à l’algorithme de l’application et je me suis dit : pourquoi pas essayer de faire un concept similaire à la Hype House – ces créateurs de contenu qui se retrouvent dans une villa à L.A. – en France ?
Tu t’es fait connaître il y a un an. Comment ton rapport au temps a-t-il changé depuis ?
C’est vrai qu’aujourd’hui je vois la notion de temps différemment. Avant, j’aurais mis toute mon énergie dans le travail. Aujourd’hui, je prends du temps pour moi.
Comment parviens-tu à être maître de ton temps ?
Il faut savoir s’écouter. Dès lors qu’on a besoin de se reposer, il faut le faire. Dans un processus de réussite, le temps de se poser est nécessaire.
Ce nouveau rapport au temps joue-t-il sur tes prises de décisions ?
J’ai appris qu’en prenant du temps pour soi, en étant plus relaxé, on avait plus de résultat et on prenait donc de meilleures décisions !
Un an après, on vous retrouve dans une émission sur C8. Qu’allons-nous apprendre sur la French House ?
Cette docu-série montre ce qu’il se passe derrière ce phénomène. C’est axé business et pas histoire perso. Cette émission a pour but de comprendre le travail des créateurs de contenus.
Tu as créé Papillon en avril, une app de dating. En quoi est-elle différente de Tinder ?
Papillon est une dating app qui vient s’opposer à toutes les applications axées sur les caractères physiques. Sur l’app, on a le profil des personnes et, au-dessus, une activité qu’ils proposent : café à 18 heures, balade au parc Monceau à 16 heures… On gagne… du temps !
Influenceurs : au coeur de la French House, dispo sur My Canal
INÈS LEONARDUZZI, CLEANEUSE NUMÉRIQUE : « PRENDRE DES DÉCISIONS… DURABLES »
Écrivaine, conférencière et cheffe d’entreprise, Inès Leonarduzzi se bat pour faire diminuer la pollution numérique…
Vous avez créé l’entreprise Digital for the planet, qui promeut l’écologie numérique. Comment éveiller les consciences ?
Inès Leonarduzzi : D’abord, en partageant toutes nos connaissances : il faut rendre accessible le savoir dont on dispose. Avec Digital for the planet, nous avons fait un travail de simplification qui a été très bien reçu.
Et comment agir ?
Il faut garder nos appareils électroniques le plus longtemps possible. Ce qui pollue le plus dans le numérique, c’est leur fabrication. Ensuite, utiliser le wifi plutôt que la 4G, parce que ça consomme 23 fois moins d’énergie. Et puis débrancher sa box le matin et la rebrancher le soir.
La Génération Z, très impliquée dans ces questions-là, est pourtant à fond dans le numérique.
On nous a donné les outils numériques, mais pas le mode d’emploi. Ce n’est pas intuitif pour nous d’utiliser le numérique de façon durable et de faire en sorte que ça nous élève intellectuellement plutôt que ça nous fasse régresser. Le chemin est long, mais nous pouvons tous appréhender le futur du numérique.
Vous avez plusieurs activités. Comment parvenez-vous à être maîtresse de votre temps ?
J’ai travaillé sur ma façon de m’organiser. Je suis une vraie bordélique ; j’ai appris à changer. Je le découpe en petites unités et j’y insère des micro-tâches. Puis je compartimente. Quand je suis au travail, je suis pleinement investie dans mon travail, et quand je suis mère, je suis mère à 100 %. À 18 heures, je récupère mon fils et là, il n’y a rien d’autre qui compte !
Ce nouveau rapport au temps joue-t-il sur vos prises de décisions ?
Je ne sais pas si la bonne décision se prend vraiment, mais j’essaye en tout cas de la prendre vite. Je réfléchis peu, sinon je me dis qu’il y aura un doute. J’essaye de prendre les décisions les plus durables, les plus raisonnées possible.
On lit le mot « futur » dans le titre de votre livre, Réparer le futur, c’est un mot important pour vous. Comment l’envisagez-vous, ce futur ?
Je suis optimiste, parce que je n’ai pas le choix. Nous n’avons pas le droit d’être pessimistes ! C’est compréhensible, mais ce serait céder à la facilité, et ça voudrait dire que c’est le début de la fin. Je suis optimiste d’abord par devoir, et parce que c’est profondément dans ma nature.
Réparer le futur, éditions de l’Observatoire, 224 pages, 18 €
VICTOR MERCIER, CHEF RESPONSABLE : « CUISINER LOCAL »
Le finaliste de Top Chef 2020, heureux proprio du resto FIEF (Fait Ici En France), a publié il y un an un manifeste pour la « souveraineté alimentaire ». Explications.
Vous avez ouvert votre resto, FIEF, dans le 11ème, en 2019. Votre menu du moment ?
Victor Mercier : On a une carte assez grand public, le produit principal est le végétal. Notre idée est de mettre en valeur l’hexagone, donc zéro importation.
Pensez-vous que, chacun à notre échelle, on peut continuer à rendre notre cuisine plus responsable ?
Bien sûr. Un changement sociétal s’opère, avec la végétalisation des assiettes. Je serais curieux de nous comparer à un restaurant au concept moins engagé qui fait de la cuisine fusion et fait venir son saumon de Norvège et sa mangue de Costa-Rica. Imaginez les tonnes de CO2 économisées !
Vous êtes ultra-sollicité. Comment parvenez-vous à être maître de votre temps ?
Je priorise. Sinon j’ai tendance à beaucoup papillonner !
Ce nouveau rapport au temps joue-t-il sur vos prises de décisions ?
Je pense que l’ouverture d’un resto est tellement concentrée dans le temps que tu évolues de façon rapide et visible. Je ne pense pas être le même cuisinier et le même homme ! J’ai appris à prendre les décisions selon les urgences.
Votre père était cadre commercial et votre mère gérante d’entreprise. Vous ont-ils accompagné dans votre choix de faire de la cuisine ?
Il y a eu une certaine réticence car ils ont vite compris la dure réalité du métier. J’ai commencé la cuisine à 18 ans, je faisais 80 heures de travail par semaine. Ce sont des conditions très difficiles… En effet, mes parents avaient raison : c’est un métier très fastidieux.
Et comment envisagez-vous le futur ?
J’aimerais ouvrir un deuxième restaurant puis partir de Paris. Je voudrais découvrir et explorer le terroir culinaire d’une région.
FIEF : 44, rue de la Folie Méricourt, 75011 Paris
HAPSATOU SY, ENTREPRENEUSE PROACTIVE : « RÉUSSIR, C’EST ÊTRE LIBRE »
Entrepreneuse, animatrice télé et écrivaine, Hapsatou Sy redéfinit les normes et encourage à l’action. Interview chrono.
À 24 ans, en 2005, vous créez votre marque de cosmétiques, HapsatouSy, éthique et engagée. De quelle manière ?
Hapsatou Sy : Au début, après avoir réfléchi aux modes de distribution, je me suis rendue compte que faire de la vente à domicile permettait à de nombreuses femmes de sortir de la précarité. On fait du local, on est végans depuis toujours… On essaye d’être éthiques et transparents.
La phrase d’accueil de votre site est « Plus qu’une marque, une philosophie »…
C’est une philosophie de la liberté. Un homme qui veut venir se maquiller est le bienvenu. Une femme qui ne veut pas mettre une goutte de maquillage fait ce qu’elle veut également. L’important est que chacun se sente bien.
Vous n’arrêtez jamais. Comment parvenez-vous à être maîtresse de votre temps ?
Récemment, j’ai appris à gérer mon planning différemment : je fais beaucoup moins, pour beaucoup plus de résultats. J’ai décidé de vivre librement.
Ce nouveau rapport au temps joue-t-il sur vos prises de décisions ?
Je forme mes équipes à ce que j’appelle « l’armoire de vie ». On se pose devant une table, on y déverse tout ce qu’il y a de notre vie aujourd’hui – avec une poubelle à nos pieds pour tout ce qui est toxique. Ce qui est précieux, on le met dans les tiroirs en haut, ce qui en vaut moins la peine, c’est en bas.
Et ce que vous rangez tout en haut ?
Ce qui compte vraiment : mes enfants, des projets professionnels excitants… Dans une journée, en dehors du sommeil, il reste 16 heures : même si on prend 5 heures de boulot à fond, c’est bien mieux que 11 heures à moitié ! Depuis que j’ai adopté ce mode de vie, je n’ai jamais été aussi heureuse.
Moralité ?
Il faut protéger son temps, ça nous aide à prendre les bonnes décisions.
On vous voit beaucoup à la télé. Vous avez commencé Secrets de conso au mois de mars…
Ça se passe très bien. Je trouve intéressant de parler de conso à l’heure où les gens ne savent plus ce qu’ils achètent.
Vous souhaitez internationaliser votre marque. Comment ça avance ?
Bien ! Mes produits sont aujourd’hui en France, en Suisse, au Sénégal, en Côte d’Ivoire… On reçoit des commandes de Corée, d’Australie… On veut voir tout le monde ensemble sans jugement –, c’est la planète dans laquelle je veux vivre.