STACY MARTIN, FUNNY LADY : RENDRE JUSTICE À LA COMÉDIE

Stacy Martin technikart

Après de nombreux rôles dramatiques (Nymphomaniac, Amants…), la comédienne franco-britannique change de registre. Dans La Graine, comédie loufoque signée Eloïse Lang, Stacy Martin forme un couple avec Marie Papillon. Et quand les deux femmes décident qu’elles veulent un enfant, elles vont vivre un sacré parcours de combattante…

La Graine part d’une réalité sérieuse – les difficultés que connaissent les couples de femmes désirant un enfant – et la transforme en comédie loufoque. C’est un film que tu avais envie de voir au cinéma ?
Stacy Martin : Oui, évidemment, c’est important d’avoir ce genre de représentations, car c’est une histoire que beaucoup de femmes vivent. C’est un sujet qui a été un peu tabou, les gens ne savent pas encore comment en parler, alors parlons-en et sans prendre des gants, ou attaquer ! Un film comme ça ouvre une porte à un public qui peut-être ne se serait jamais dit qu’il avait envie de regarder un film sur deux femmes qui essayent d’avoir un enfant.

Qui plus est sous forme de comédie.
Oui, c’est un genre où l’on peut parler d’une quantité de choses avec davantage de distance. D’ailleurs, j’avais adoré Connasse et Larguées (tous deux réalisés par Éloïse Lang, ndlr), il y a quelque chose d’extrêmement humain dans sa manière de travailler. 

C’est un virage dans ta carrière. Tu l’attendais ?
Oui ! C’est quelque chose dont j’avais besoin en tant qu’actrice, moi qui ai beaucoup joué dans des drames. C’était un challenge assez inattendu, car c’était une autre manière de travailler. C’est important de rendre justice à la comédie comme genre. En tout cas, c’était dans la logique de mon parcours, et puis j’aime bien les défis.

Stacy Martin technikart
VIVE COMME L’ÉCLAIR_
Stacy Martin porte avec aplomb une des pièces signature de Nicolas Ghesquière, chez Louis Vuitton Femme : le zip XXL.


Selon ce film, l’image qu’on a de la maternité depuis des siècles a quelque chose de fake.

Je suis d’accord. Dans le désir d’avoir un enfant, il y encore cette notion romantique, on s’imagine entourée de fleurs… Alors qu’un processus de PMA, par exemple, est très compliquée. Parfois ça remet des problèmes de couple en question, parfois ça ne fonctionne pas… Pour la mère porteuse, il y a aussi un processus d’hormones : elle a les docteurs au téléphone tous les jours, il y a donc quelque chose de très scientifique qui enlève ce côté féérique. Mais comme le dit le film, tout naît d’un amour et l’amour prime toujours.

La moralité du film serait « l’amour, c’est le pouvoir » ?
À mon sens, la fin du film n’est pas la fin de l’histoire. C’était important d’avoir une fin « ouverte », car il n’existe pas de fin parfaite. La vie continue comme dans cette comédie. La fin du film est donc la continuité logique de ce qui pourrait se passer dans la vie, ces femmes qui par cette quête rencontrent des obstacles mis en place par les gouvernements, les politiques, même si c’est fait de manière discrète. C’est tellement compliqué de faire ce parcours. Donc le film dit « n’oublions pas de nous concentrer sur l’amour ».

Ce film peut-il changer les choses ?
La réalité peut être très simples quand on en a envie. Pourquoi la PMA n’a été acceptée qu’en 2021 ? La fin du film montre en tout cas qu’il existe des solutions, toutes sortes de solutions !

Le désir d’enfant est-il en train de changer ?
Beaucoup de femmes ont des enfants plus tard, n’en veulent plus, ne peuvent pas en avoir, ne veulent pas de vie de famille… Ces cas de figure ne sont plus considérés comme des faiblesses ou des échecs, tant mieux !

Qu’as-tu en commun avec ton personnage, Inès ?
Elle est intense, car elle passe beaucoup de temps dans sa bulle, je peux être comme ça. Une fois qu’elle veut quelque chose, elle est déterminée et en même temps elle vit complètement dans son monde. C’était un personnage génial à jouer car elle est dans le contrôle et à un moment, elle vrille.

Trouves-tu que les personnages féminins sont en train d’évoluer ?
Oui, mais il y a encore du chemin à faire. Dans La Graine, j’ai bien aimé le fait que le film ne remette pas en question la notion de couple, et n’en fait pas un statement non plus, pour une fois. Il montre ces deux femmes telles qu’elles sont.

La Graine de Eloïse Lang, sur Prime Video à partir du 3 mai.

 

Entretien Mathilde Delli
Photos Davide Carson