À 26 ans, Timothée Chalamet est au sommet du monde. Il tourne dans les films les plus excitants du moment, affole les réseaux sociaux et redéfinit les codes de la masculinité. En pleine promo du vénéneux et sublime Bones and all, doublement primé à Venise, nous l’avons rencontré à Londres, en compagnie de la révélation du film, Taylor Russell.
Les publicits et agents de la Warner nous avaient prévenus, Timothée Chalamet est incroyablement cool, un jeune mec ultra-talentueux, simple et modeste. Une star, quoi ! Alors que le tournage de la suite de Dune se déroule entre Budapest, Abu Dhabi, en Jordanie et en Italie, Timothée est à Londres pour une journée promo pour Bones and all, où il est question d’amour fou et… de cannibales, un diamant noir signé Luca Guadagnino, que Timothée a produit.
Au sommet du monde à seulement 26 ans, Timothée Chalamet s’offre un sans-faute, refuse les grosses machines désincarnées made in Hollywood et semble suivre les conseils que Leonardo DiCaprio lui a donnés sur le set de l’épatant Don’t look up, déni cosmique : « Pas de drogue dure et pas de films de super-héros. » En une dizaine d’années, Timothée a travaillé avec Christopher Nolan (Interstellar), son ami Luca Guadagnino qui l’a propulsé dans la stratosphère avec Call me by your Name, Greta Gerwig (Lady Bird et Les Filles du docteur March), Woody Allen (Un jour de pluie à New York), Scott Cooper (le western Hostiles avec Christian Bale) ou encore Wes Anderson (The French Dispatch). Ce n’est plus une filmo mais un tableau de chasse, d’ailleurs cinq de ses films ont été nominés à l’Oscar du Meilleur film… De plus, avec ses yeux verts, ses boucles rebelles, sa mâchoire angulaire, sa silhouette gracile d’ado et ses costumes stylés, il mixe avec élégance les codes masculins et féminins, devient le représentant d’une masculinité décomplexée, pour le plus grand bonheur d’une génération qui cherche à déconstruire les clichés délétères entre genres. Sur le tapis rouge de Venise, il a écrasé la concurrence et enflammé les réseaux avec sa combinaison à dos nu, dans un tissu et un tricot lamés, réalisée avec des fils métalliques, dessinée par Haider Ackermann.
Dans le nouveau film de Luca Guadagnino, Timothée Chalamet incarne donc un « Eater », un cannibale qui dévore intégralement ses victimes, « bones and all »… Pour son rôle, il s’est fabriqué un look de redneck rebelle, coupe mulet improbable, cheveux teints, jeans déchirés. Avec la révélation Taylor Russell, il traverse des paysages désertiques du cœur de l’Amérique rurale, en quête de proies et surtout d’amour.
À Londres l’entretien a lieu en compagnie de la Canadienne Taylor Russell, découverte dans la série Falling Skies, puis dans le nanar Escape Game. Quand il m’aperçoit avec mon tee-shirt Marvin Gaye, Timothée laisse éclater un tonitruant « Oh man, what a cool tee-shirt ! » et se met à chanter à tue-tête « What’s going ooooon… » C’est parti !
« J’AI RENDU MON PERSONNAGE PLUS FAIBLE, VULNÉRABLE, MOINS SÛR DE LUI, BEAUCOUP MOINS MÂLE ALPHA. » – TIMOTHÉE
Plus qu’un film de cannibales, est-ce que l’on peut envisager Bones and all comme une histoire d’amour fou ?
Timothée : Il me semble évident que les deux personnages principaux vivent au jour le jour, ils enfreignent la loi, ils sont sauvagement amoureux, ils n’ont pas d’argent : donc oui, ça ressemble à l’amour fou. C’est même au-delà de l’amour fou, passionné ; ils sont en sécurité l’un avec l’autre, ils se font entièrement confiance, ils s’épaulent, ils sont vrais, c’est du pur amour, très mature.
Comment votre génération regarde-t-elle l’amour fou, l’amour sans jugement ? Et pensez-vous qu’il y ait une demande chez les jeunes spectateurs pour ce genre histoires ?
Taylor : Cette génération est vraiment futée et elle veut des œuvres sincères, authentiques, originales.
C’est difficile de jouer l’amour fou ?
Taylor : Timmy connait bien Luca depuis Call me by your Name, ainsi que les producteurs. Ils sont comme une famille alors que j’étais quant à moi la nouvelle venue. Timmy m’a fait aussitôt me sentir à l’aise, comme si je faisais partie de cette belle famille. C’est très important sur un tournage, de se sentir accepté, aimé. Timmy a été un roc pour moi. C’est un acteur généreux, mais c’est aussi et surtout une personne généreuse, avec un très grand cœur. Des qualités que l’on ne retrouve pas tout le temps, je crois…
Le film se déroule dans les années 1980, dans un monde sans Internet, mais il parle de la jeunesse d’aujourd’hui, isolée, abusée, abandonnée ou maltraitée par les adultes, de la jeunesse en quête de care, de bienveillance et d’amour.
Timothée : Je n’y avais pas pensé, mais c’est intéressant. Je vais parler en mon nom. L’épidémie de Covid a percuté notre génération de plein fouet, elle l’a isolée socialement. Mais il y a aussi le réchauffement climatique, les conflits mondiaux, l’inflation, les problèmes de nutrition… J’ai l’impression que les jeunes voient ce vieux monde mourir. Ils sont isolés. Comme vous l’avez dit, Bones and all capture l’essence de tout cela, même si c’est étrangement un film de cannibales. Je suis vraiment d’accord avec vous, il y a quelque chose d’absolument contemporain dans cette quête des deux personnages des années 1980, dans cette urgence de vivre malgré tout.
Comment s’est passé le tournage ?
Taylor : Nous avons tourné dans l’Ohio, le Kentucky, le Nebraska… Nous avons tourné pendant 48 jours, en avril 2021.
Vous aimez les films d’horreur ?
Timothée : Pour être tout à fait honnête, ….
Lire la suite dans notre dernier numéro ici :
Bones and all
Sortie en salles le 23 novembre
Entretien Marc godin